Stage de formation syndicale

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2 JOURS DE FORMATION AVEC Robert JOUFFRET Par G. ORSI

Les 8 et 9 janvier le SNEP académique a organisé à Mougins un stage de formation syndicale ouvert à tous les collègues et animé par Robert Jouffret, secrétaire national du SNEP. Nous avons choisi la forme d'une "interview fictive" pour en relater succinctement le contenu.

Snep : "En tant que formateur, comment as-tu vécu ces deux journées?

R.J : Sur le fond, j'ai réussi à passer mon message. Le groupe a su s'adapter à mon rythme : recevoir le plus d'informations possibles dans un temps limité. Sur la forme, l'idéal aurait été une journée de plus, ça nous aurait permis d'échanger et de débattre davantage…

Snep : Justement, peux- tu préciser en deux mots quel était le contenu de ce "message" ?

R.J: J'explique aux collègues qu'à la base, le syndicalisme s'est toujours bâti sur l'idée qu'à plusieurs on était plus forts pour résoudre les problèmes professionnels que tout seul dans son coin. Mais si des solidarités se sont opérées c'est qu'à chaque fois les problèmes et les dangers étaient lisibles comme lors de la traversée du triangle des Bermudes: Comiti, Mazeaud, Soisson ! Or aujourd'hui on éclate les problèmes en différenciant les statuts, les types d'établissements, les barèmes…De sorte que chacun baigne dans une extraordinaire confusion qui n'est pas de nature à rendre les choses lisibles et à créer des solidarités. Bien plus, j'essaie de pointer les mécanismes pervers qui font qu'aujourd'hui, en visant des stratégies de carrière personnelles, chacun peut être entraîné à considérer l'autre comme un adversaire et non comme un allié potentiel.

CREER DES SOLIDARITES

Snep: Si des liens de solidarité se distendent, comment faire alors pour les resserrer ?

R.J : C'est précisément le but de ce stage: il faut mettre en relation les problèmes. Je décortique les grands éléments de la machine non pas tellement pour les étudier en tant que tels ( je renvoie les collègues à leur propre formation) mais pour mettre en relief l'effet qu'ils peuvent produire sur les autres. Par exemple, se battre pour plus de créations d'emplois c'est mener le combat pour les retraites, ce qui suppose de reconsidérer les modes d'attribution de l'avancement et des promotions… Vouloir faire réussir ses élèves, c'est élaborer un programme cohérent, ce qui implique la revendication d'installations de qualité, qui ne va pas elle même sans négociations de créneaux avec les municipalités, d'où nécessité de points d'appuis avec les différents acteurs de la collectivité etc…

METTRE LES PROBLÈMES EN RELATION

Snep : C'est l'histoire de la pelote et du fil !

R.J : Exactement. Dans un premier temps je décris globalement la composition de cette pelote: l'EPS, l'Ecole, le service public, la protection sociale, l'administration, les grandes orientations politique, l'Europe, les Organismes mondiaux …Puis j'insiste sur le fait que chaque élément du système est interdépendant de l'autre. De sorte que la prise en compte du moindre problème professionnel suppose la création d'un réseau de solidarités et d'alliances plus ou moins important. D'un point de vue syndical cela conduit à se rassembler autour d'une base minimale de revendications. Celle-ci étant également fixée avec réalisme en fonctions d'éléments divers: l'intérêt particulier et l'intérêt général, le contexte syndical, économique, politique , électoral … Snep: Le syndicat joue un rôle de fédérateur et parfois de régulateur. Mais face à cet enchevêtrement de facteurs il doit être souvent amené à défaire les nœuds, non ? R.J: En effet. Et ce travail est compliqué, d'où cette formation. Au cours du stage j'ai essayé d'en démêler quelques uns comme la D.H.G, la revalorisation, la Hors Classe…Il faudrait poursuivre ce travail l'année prochaine, en suivant cette démarche, à l'occasion d'autres journées. Quelques "nœuds" particuliers pourraient être retenus: rythmes scolaires, A.S, programmes…

LES SIGNES INQUIETANTS D'UN RENOUVEAU PROFESSIONNEL

Snep : Depuis 12 ans tu sillonnes la France à raison d'1 voire 2 stages de formation syndicale par semaine. C'est énorme! Comment t'apparaît notre métier, y vois-tu une évolution ?

R.J : Il y a de plus en plus de souffrance dans la profession liée aux conditions de travail et à l'impuissance face au phénomène massif de l'échec scolaire. Les profs souffrent de la souffrance de leurs élèves. Et ces problèmes leur semblent de plus en plus compliqués et illisibles. Comme le Snep ne parvient pas toujours à l'éclaircissement souhaité, il se crée une méfiance, un "doute syndical" …

Snep : Et chez les jeunes sortants?

R.J : Il y a un renouvellement de la profession qui me semble moins marqué idéologiquement et politiquement que nous l'étions. Les collègues se demandent pourquoi parler de tout ça avec le SNEP, pourquoi ne pas s'en tenir aux questions techniques: mutations, avancement, salaire ?

SNEP : Ce décalage affecte-t-il la syndicalisation ?

R.J : Possible mais attends, il faut être réaliste! Même si en valeur absolue la syndicalisation se maintient, la tendance est globalement à la baisse. On a suivi par exemple sur 2 ans des jeunes: les 3/4 ne se sont plus re-syndiqués !

Snep : En formation syndicale les besoins ont-ils évolué ?

R.J : Les contenus, pas tellement. On retrouve toujours à peu près les mêmes types de questions corpos, péda…Par contre il y a une montée en puissance de l'attitude consumériste du type "je paie ma cotise donc j'ai droit": d'être défendu, d'être muté, de changer de corps…Le SNEP est un prestataire de service à qui on demande des comptes et que l'on tient responsable en cas de vœux non réalisés. Mais le trait le plus marquant c'est de croire à son effet magique : "si on est syndiqué on a plus de chances d'être muté, de passer au grand choix, de réussir le Capeps…". Le paradoxe c'est que plus vite le Snep cherche à les ramener à une autre réalité, plus vite ils posent la question à 10 000 dollars: "mais alors à quoi ça sert d'être syndiqué?!"

Snep : Face à cette crise de sens, les journées de" formation syndicale" peuvent-elles contribuer à l'établissement d'une communauté de valeurs ?

R.J : Sans aller jusque là , une culture syndicale minimale, basée sur quelques repères communs me semble possible. Il faut un cadre pour comprendre une mécanique (la DHG par ex) et à travers lui l'histoire du mouvement social, sa dynamique, les raisons pour lesquelles les batailles syndicales ne sont jamais gagnées et les petites victoires rarement menées pour rien. Si aujourd'hui les collègues ne sont pas plus individualistes qu'hier, le contexte peut, par contre, en pousser certains à devenir moins solidaires". G.Orsi