Enseignants d'EPS  : pour une diminution des services

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Enseignants d'EPS : pour une diminution des services

Le métier d'enseignant d'EPS présente des caractéristiques communes à tous les métiers d'enseignants, il présente également un certain nombre de spécificités.

Un métier complexifié
Le rapport Bancel notait une " évolution forte des conditions d'exercice du métier d'enseignant ", les difficultés " liées à la massification de l'enseignement ", " les publics de plus en plus hétérogènes ". Il notait également que les enseignants " sont trop souvent soumis à des pressions, des polémiques, voire des outrances médiatiques ". Hétérogénéité des élèves, montée de la violence, exigences accrues des familles, multiplication des tâches, etc… autant de caractéristiques de l'évolution de la situation qui touchent les enseignants d'EPS comme les autres.
Membres à part entière des équipes pédagogiques, les enseignants d'EPS s'impliquent pleinement dans la nécessaire transformation du système éducatif. Leur rôle social, leur utilité dans le service public d'enseignement n'est nullement remise en cause dans l'opinion ; au contraire, les enquêtes mettent en évidence l'intérêt des élèves et des familles pour l'EPS.
Le rapport Bancel constate que " les enseignants, confrontés à des évolutions contradictoires, à des remises en question importantes, ne se sont pas réfugiés dans l'immobilisme ; ils ont su inventer des réponses ". Les enseignants d'EPS, souvent initiateurs et porteurs de projets faisant sens pour les élèves, attachés aux apprentissages disciplinaires comme au travail interdisciplinaire, habitués au travail collectif, soucieux de la bonne marche de l'association sportive, prennent une part reconnue dans cette action d'adaptation et de transformation.

Des réalités méconnues
- Un cours d'EPS, une séance d'association sportive, cela se prépare ; parce que le professeur d'EPS est en constante implication dans des travaux pratiques permanents avec les élèves, il se doit d'anticiper sur ses objectifs, les situations proposées, les risques éventuels encourus par les élèves, de prévoir les possibilités de réponse élèves et les remédiations nécessaires. C'est là un travail long et complexe.
- Si l'enseignant d'EPS n'a pas de copie à corriger, l'évolution du métier, les exigences de l'institution multiplient les procédures d'évaluation. Les enseignants d'EPS mettent en place constamment des évaluations formatives, les traitent, en rendent compte aux élèves. Comme tous les enseignants ils procèdent à des évaluations sommatives. Leurs outils sont souvent complexes (grilles, fiches, nomogrammes, outil vidéo, utilisation des TICE,…), ils doivent les rendre explicites et lisibles par les élèves. Cela nécessite du temps.
- L'indispensable massification de l'enseignement fait que, comme les autres collègues, l'enseignant d'EPS est de plus en plus confronté à des élèves " difficiles ", dont une grande partie sont en refus de l'école. Si bon nombre d'élèves aiment l'activité physique et donc l'EPS, nombreux sont ceux qui la conçoivent seulement comme un défoulement, une récréation et sont en refus d'apprentissages. D'autres jeunes, de plus en plus nombreux refusent l'activité physique. L'idée souvent mise en avant d'un enseignement " facile " parce que s'appuyant sur des activités ludiques se révèle être une idée reçue !
- Le champ vaste des APSA, leur évolution constante, les exigences pédagogiques et didactiques supposent lecture de travaux et publications, échanges entre collègues, formation continue active et régulière.


Des spécificités lourdes
- Le cours d'EPS nécessite une vigilance permanente : les élèves y sont en mouvement, dans des situations qui présentent souvent un risque à contrôler. Lancer l'activité des élèves, leur préciser les buts, les orienter sur des tâches, les conseiller, les évaluer en temps réel pour réorienter la situation proposée et les exigences, apprécier les moments de changement de situation, les durées, l'intensité des efforts demandés, individualiser au mieux le travail, dans un espace souvent vaste et parfois changeant (APPN), …nécessite une attention de tous les instants. L'enseignant d'EPS est amené à prendre dans l'immédiat des décisions si conflit ou accident. Stress et tension nerveuse sont importants. Cela d'autant que les effectifs en EPS sont lourds puisqu'il n'y a pas de dédoublements en EPS malgré la situation permanente de travaux pratiques et alors que certaines activités le nécessitent.
- Une pénibilité physique importante : les professeurs d'EPS sont amenés à faire des efforts physiques répétés (démonstrations, aides, parades,…). Le cours d'EPS implique une forme physique permanente qui nécessite un entretien personnel. Les cours ont souvent lieu dans des espaces vastes, mal insonorisés, (stades, gymnases, piscines, pleine nature), nécessitant des formes d'intervention particulières, une attention soutenue, un timbre de voix élevé. Le manque d'installations couvertes, mais aussi la nécessité d'enseigner des activités comme les sports de grands terrains, l'athlétisme, les APPN,… impliquent qu'une partie non négligeable des cours se déroule en extérieur, et est soumise aux intempéries. L'ensemble de ces éléments aboutissent à une pénibilité particulière et nombreux sont les accidents musculaires, articulaires, les maladies professionnelles (ex.dorsalgies, problèmes de cordes vocales,…) qui y sont liés… Le docteur Zorman, médecin conseiller auprès du recteur de Grenoble avait déclaré en 1997 lors de la table ronde : "pas de classe sans enseignant" : "Les enseignants d'EPS forment un groupe qui est exposé à des risques spécifiques : leur enseignement nécessite un fort investissement corporel. Ils doivent, comme les autres enseignants, poursuivre leur activité jusqu'à 60 ans. Cela peut être rendu difficile avec la diminution des capacités physiques liée à l'âge et la fréquence des séquelles traumatiques". Il caractérise donc les enseignants d'EPS comme une "population à risque".
- Des tâches très particulières : le professeur d'EPS doit, comme tout enseignant veiller au bon déroulement de la séance, mais il est le seul à devoir aussi surveiller des vestiaires, des douches, à devoir, avec les installations très souvent éloignées de l'établissement, effectuer et surveiller les déplacements (à pied, en bus, en métro,…) de classes nombreuses. Cela alors qu'actuellement se multiplient les agressions pendant le trajet, ou sur les stades. L'entretien, la gestion du matériel d'EPS, son installation en début de séance, son rangement en fin sont le plus souvent à la charge des enseignants.
- Des négociations avec des décideurs et des partenaires : l'équipe pédagogique EPS est la seule à devoir, le plus souvent, négocier ses installations avec les collectivités territoriales, les équipes EPS des autres établissements, à devoir gérer des commandes de cars pour se rendre sur des installations, etc.
- Un travail en équipe indispensable : Les enseignants d'EPS doivent obligatoirement travailler collectivement, se concerter, pour la gestion des installations, du matériel, le projet pédagogique, le règlement intérieur de l'EPS (tenues, inaptitude, utilisation des locaux,…), les examens en CCF. Il gèrent, en liaison avec la médecine scolaire les dispenses, les C.M.
- Initiateurs de projets lourds : les enseignants d'EPS ont le souci de créer des événements liant pratique concrète, citoyenneté et vie de l'établissement (sorties, séjours sportifs, compétitions interclasses,… ). Ces projets sont souvent lourds en terme d'organisation, de responsabilité.
- Un forfait bien rempli : Le fonctionnement correct d'une association sportive nécessite un investissement qui dépasse bien largement le forfait de trois heures. Il implique des temps d'entraînements et de rencontres, des déplacements parfois longs, la participation à des tâches d'organisation de compétitions, des contacts permanents (élèves, autres équipes, parents, sociétés de transports, réservation d'installation…), un travail d'organisation, de gestion (des licences, CM, finances de l'AS, matériel…), des réunions au niveau de l'AS, du district, du département, etc.

Ces caractéristiques justifient pleinement la diminution des maxima de service des enseignants d'EPS, après celles intervenues pour les PLP et les enseignants des disciplines artistiques.

Serge CHABROL