Depuis deux dans le bassin de formation Nice a été mise en place une expérience originale qui anticipe sur les propositions du MEN concernant la nouvelle troisième.

La classe de troisième PVP (préparation à la voie professionnelle) propose à des élèves intéressés à une orientation future vers l'enseignement professionnel, une « maquette » différente de celle de la troisième traditionnelle :

• Un enseignement renforcé en technologie ou de vie professionnelle
• La suppression de la 2 nde langue
• Une journée ou une demi-journée par semaine de bain en LP

L'an passé et l'année d'avant, deux établissements avaient mis en œuvre cette classe avec un succès important auprès de certains élèves qui voyaient là une nouvelle motivation, un soutien des familles qui malgré les difficultés rencontrées pour les bains en LP (déplacements à la charge des familles, articulations des emplois du temps problématiques, formations en LP pas toujours en cohérence avec les projets des élèves, etc…) envisageaient les poursuites d'étude de leurs enfants avec beaucoup plus de sérénité, et un engagement croissant des collègues qui voyaient des élèves en situation de décrochage redémarrer de façon spectaculaire.

Depuis plusieurs années le dispositif informatique PAM est utilisé pour l'orientation des élèves de troisième et dans ce cadre là les résultats des élèves de ces classes étaient affectés d'un coefficient supérieur à 1 en ce qui concerne les orientations en LP.

Cette année 8 établissements du bassin ont ouvert des sections 3 ème PVP, augmentant ainsi de manière importante le nombre d'élèves concernés. Le risque de barrer l'accès à certaines filières de LP aux élèves de troisième « normale » est donc devenu important. L'IA a donc décidé de supprimer le coefficient positif et de le remplacer par un négatif après plusieurs simulations (au prétexte que les élèves de ces sections seraient sur notés !!!!) afin que la même proportion d'élèves issue des 2 types de formation puisse intégrer les LP (ce qui est une vision assez réductrice de l'équité).

Résultats :

• Un nombre important d'élèves (relativement au nombre de candidats) restent sur le carreau.
• Certains élèves de 3ème PVP auraient pu obtenir une affectation s'ils avaient suivi le cursus normal.
• Les élèves qui n'obtiennent rien ne peuvent même pas se rabattre sur la seconde générale puisqu'ils n'ont plus de seconde langue.
• Les élèves qui n'obtiennent rien peuvent se rabattre sur l'apprentissage et aller ainsi grossir les rangs du « bétail » du patronat ;
• Les élèves qui s'étaient engagés l'on fait, la plupart du temps, parce qu'ils avaient un projet finalisé et ils ne sont donc pas prêts à passer du sanitaire et social à l'esthétique ou la métallerie, comme on leur propose aujourd'hui.
• La sous estimation des effets du succès de cette classe par l'IA du 06 et les solutions technocratiques proposées font que la plupart d'entre eux se retrouvent sans solutions après qu'on leur ait fait miroiter (de bonne foi pour les collègues et les chefs d'établissement) une ouverture intéressante
• Les collègues s'interrogent sur l'opportunité de poursuivre une telle expérience, au moment où le MEN se propose de la généraliser. Mais peut être que ceux qui ont imaginé ce système n'ont pas tout bien mesuré. On ne peut dans le même temps demander aux équipes pédagogiques de construire avec les élèves des parcours d'orientation vers l'enseignement professionnel et refuser d'augmenter et de diversifier les capacités d'accueil dans les lycées professionnels; à moins que le choix de l'apprentissage patronal contre le service public ait été fait délibérément, ce qui est contradictoire avec les analyses du haut conseil de l'évaluation de l'école qui indiquent une exigence importante de l'élévation du niveau de qualification et de formation initiale de tous les salariés.

Dominique Henrot