Situation à L’UFR-STAPS DE TOULON par Michel Canal


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QUELQUES REMARQUES DE FOND

Depuis bientôt 20 ans les formations en STAPS se désintéressent du devenir professionnel de leurs étudiants.

Pour bien des raisons :

Les résultats sont :

Les jeunes collègues titulaires du CAPEPS ou de l’agrégation trouvent des difficultés à enseigner certaines disciplines à peine abordées dans le cursus (10 séances de 2h maximum par discipline de polyvalence dans tout le cursus).
Notre pari était que la formation leur permettrait de s’adapter quelle que soit la situation.
Le constat est que certaines disciplines très techniques ou à risque sont de moins en moins enseignées.
Notre action de formation se limiterait parfois à une simple formation en animation sportive.

Une conséquence que nous voyons poindre actuellement est le manque de motivation pour enseigner dans le secondaire. Cela effraie les étudiants et le temps de formation nous manque pour relativiser et donner des repères pour prendre confiance et susciter des vocations profondes. D'autant plus que les étudiants mettent en balance la quantité de connaissances nécessaires pour 1) avoir la licence 2) réussir le CAPEPS.

Que se fait-il alors dans les UFRSTAPS ?

De la recherche et c’est très bien, nous ne sommes pas contre la recherche puisque c’est souvent nous qui avons contribué à la mettre en place et des administratifs, des scientifiques très sérieux y participent
Cependant, si nous reprenons les principales questions qui se posaient à propos des STAPS après 10 ans d’existence au début des années 90 les réponses n’ont pas changé 20 ans après.

Peux-on considérer que 20 années de recherche en STAPS ont permis de « diminuer l’arbitraire dans les domaines que se proposait de couvrir la discipline ?

C’est très discutable en admettant d’abord que cela soit vraiment possible. Les gourous existent toujours dans le milieu sportif, le fitness est toujours plus ou moins en friche (où plusieurs courants s’affrontent) et l’évaluation dans les cours d’EPS ne brille pas par sa clarté reconnue par tous (les élèves sont bien parfois incapables de dire comment ils sont évalués).

Les laboratoires de recherche en STAPS ont-ils su développer une méthodologie spécifique ?

Bien sur le problème n’est pas simple et tous les laboratoires pensent sans doute œuvrer dans cette direction. Mais force est de constater que la distinction pour ne pas dire la guerre entre les sciences biologiques et les sciences humaines (sciences dures, sciences molles) fait rage au sein des STAPS malgré le besoin ressenti, par de nombreux étudiants en thèse, de joindre différentes approches.
Et cela ne peut qu’avoir des conséquences désastreuses sur la définition des profils et sur les nominations dans les postes universitaires.
Les personnes venant d’autres domaines sont de plus en plus nombreuses à intégrer les UFRSTAPS, ce pourrait être positif, à condition que les STAPS soit justement bien définies et nous en sommes loin.

D’autre part la relation recherche théorique et application pratique s’effectue très mal au travers du peu de cours pratiques effectués par les maîtres de conférences et de l’inexistence des collaborations qui devraient être obligatoires entre des universitaires débordés par une recherche qui est leur baromètre sanction et des enseignants du secondaire, détachés ou simples intervenants extérieurs, débordés par des tâches d’enseignement et, disons le, plus ou moins exploités et parfois méprisés.

Les équipes STAPS ont-elles su fonder un paradigme susceptible de les réunir, de les motiver, de donner une direction aux travaux à venir ?

Je reprendrais simplement le constat très sévère fait par le professeur Gallien au Journées de l’ACAPS en novembre 1991, car la situation semble s’être figée :
« Sur ce point encore on doit donner une réponse négative et c’est le plus désolant, en 10 ans d’existence, la discipline STAPS n’a pas su trouver les repères de sa propre identité. Les différentes équipes, au lieu de s’enrichir mutuellement de leur diversité …….. n’ont su que juxtaposer leurs solitudes dans un ensemble flou générateur de spéculations hasardeuses et de frustrations »
Que vont devenir les étudiants en fin de cursus qui ne trouveront pas tous un poste de MCF en STAPS et avec amertume passeront le concours du professorat des écoles après des années d’espérance ? Ils n’auront sans doute pas su créer les métiers de demain.

La question reste posée comme le disait M. Gallien à l’époque :

Les STAPS constituent une discipline en elle-même et si oui, quel en est l’objet ?
Ou bien
Les STAPS sont-elles un domaine particulier d’application pour d’autres disciplines et en ce cas, quelles disciplines et pour quelles applications ?

Sciences du sport, sciences du mouvement, science de la motricité, les appellations ne manquent pas mais qu’y a t il derrière ? Les questions restent posées dans les faits et l’équivalent pour la biologie de l’économie pour l’écologie, que J.de Rosnay appelait de ses vœux dans les années 80, c’est-à-dire une science de la gestion de la vie physique, n’existe toujours pas. Que dire aux élèves sur l’échauffement alors que cela figure au programme de toutes les classe et que l’empirisme (parfois très juste) règne et que les études scientifiques dans ce domaine en France paraissent bien minces ? Que dire alors sur l’apprentissage et les techniques d’intervention ?

Actuellement, puisque nous n’avons pas su répondre à toutes ces questions en interne, et bien les STAPS vont être définies de l’extérieur et replacées à un niveau qu’elles n’ont pas quitté si on écoute ce qui se passe toujours dans les conseils de classe des établissements scolaires. Pourtant une formation telle que celle donnée dans les UFR STAPS peut aider à participer efficacement à des projets type IDD et d’ailleurs souvent les enseignants d’EPS sont aux avant-postes dans ce domaine.
S’il fallait entrevoir une solution, elle passerait bien sur par la lutte pour une identité STAPS au travers de sa recherche. Bien sur les chercheurs en STAPS sont soumis comme leur collègues des autres disciplines à la pression du système de publication. Un dossier scientifique « se monte » avec des publications de bon niveau scientifique, au risque d’y perdre sa spécificité.
Bien sur, les jeunes chercheurs peuvent difficilement mener ce combat, mais qu ‘en est-il des professeurs dont l’engagement politique, ou corporatiste (dans le bon sens du terme) semble bien loin derrière un souci de rayonnement personnel. Ne faut-il pas convaincre nos éminents chercheurs que le particularisme des STAPS impose une singularité des hommes qui prétendent vouloir les constituer. Cette singularité consisterait à mener des travaux dans la plus grande rigueur scientifiques et parallèlement s’intéresser à éclairer , à l’aide d’approches originales, les problèmes issus du terrain.


Résumé de l’opinion générale :
Pourquoi et comment se battre pour les STAPS dans leur état actuel ?(sans même parler du LMD). Nous avons l’impression de mener à bout de bras, depuis pas mal d’années, une formation caractérisée par une explosion des effectifs et une demande forte pour de la filière dite « éducation et motricité » (60 à 80 % des effectifs de la licence) qui nous est presque totalement confiée avec des moyens distribués parcimonieusement. Notre opinion est par ailleurs peu prise en compte, au vu de la composition statutaire du conseil d’administration de l’UFR STAPS.
D’autre part, l’Education Physique et Sportive semble régresser à tous les niveaux, car dans sa recherche d'un référentiel scientifique nécessaire à une discipline d'enseignement ("savoir savant") on se fourvoie en allant du côté des STAPS où depuis bien longtemps on est dans l'oubli du sujet apprenant.
La situation de Toulon nous semble illustrer parfaitement la dynamique d’évolution actuelle des STAPS, depuis la création des IUFM. Centration des UFR sur des formations autres que l’EPS, laissant ces dernières aux IUFM.
Toulon est une UFR récente qui a choisi de développer, au niveau de sa recherche, l’ergonomie sportive et de la performance. Dans la perspective d’excellence de la recherche que réclame le ministère, les recrutements ont été fait essentiellement au service du laboratoire, en ne prenant en compte que de manière très annexe, les besoins en enseignement. Les étudiants reçoivent donc une formation qui porte le sceau du laboratoire sans trop se soucier des contenus nécessaires à une « formation équilibrée et adaptée » des étudiants.

Ce sont 20 ans de luttes collectives qui partent peut-être en fumée. Il est sans doute temps de repenser toute la formation avec ceux qui y croient encore car le repli sur soi, le défaitisme et la dérision nous guette.


Michel CANAL

Autre réaction par rapport à la position du SNEP

En ce qui concerne la lettre du SNEP, je ne comprend pas que le syndicat de l'éducation physique veuille défendre un deuxième et troisième cycle qui lui sont parfaitement étrangers et qui ont totalement renié l'EPS pour paraître plus sérieux , plus scientifiques aux yeux des autres disciplines universitaires ( ou bien alors certains ont cherché à nous le faire croire et en ont bien profité depuis )
Tout ça pour dire qu'au niveau des collègues enseignants chercheurs , à part pour quelques personnes qui ont une bonne mémoire, qui savent d'où elles viennent et ce qu'elles doivent à l'EPS et à ses luttes, la notion d'Education physique a complètement disparu et  je ne saisi pas (ceci depuis quelques années) pourquoi le SNEP se bat pour la création de postes d'enseignants chercheurs en STAPS qui la dénigrent, lui tourne le dos ou bien pour les plus jeunes la méconnaisse totalement.
Que le SNEP se préoccupe de ce qui le regarde à savoir : l'EPS à l'école , le premier cycle de formation STAPS option éducation et motricité ( surtout la licence) et puis bien sûr de ce qui se passe dans les IUFM . Et puis c'est tout !!!
Pour ma part si le troisième cycle STAPS disparaissait , ce ne serait pas une catastrophe pour l'EPS , car encore une fois je le répète l'EPS n'y trouve pas sa place et donc pas de retour sur les pratiques (de toute manière le sigle STAPS a lui aussi disparu au niveau du DEA pour devenir Sciences du mouvement humain , ce qui fait déjà beaucoup plus sérieux). Je souhaiterais simplement la mise en place d'un premier cycle universitaire plus professionnalisant.