L’AGCS : QU’ES ACO ? Par G. Orsi


Copyright Snepnice 2004

Au cœur de l’OMC

Depuis quelques années, les tenants de la mondialisation libérale ( que je n’ai pas l’honneur de connaître personnellement) se sont dotés d’un puissant outil, l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), afin de livrer au marché tout ce qui peut accroître leur chiffre d’affaire (on s’occupe comme on peut !). Désormais, tout est menacé d’être soumis aux règles du commerce : le courrier, l’enseignement, la médecine, les transports, l’énergie, l’eau …
En ce moment même, des négociations capitales pour l’avenir de notre planète se déroulent à l’OMC, elles doivent être achevées le 1er janvier 2005 (c’est bientôt !). Ces négociations, s’inscrivent dans le cadre de ce qu’on appelle « l’Accord Général sur le Commerce des Services »(AGCS). C’est un sigle qui mérite d’être mieux connu.

Bien sûr, la Presse (tiens, la revoilà celle-la) en parle peu, comme s’il était dangereux que les populations sachent ce qui s’y passe réellement : « quand on veut assécher le marais, il ne faut pas prévenir les grenouilles ! », vous le connaissiez ce dicton ? Et pourtant le risque est bien là ! (séquence Frisson !)

AGSC = danger !

Les négociations portent sur la possibilité de mettre sur le marché de la concurrence et de la rentabilité (hormis les 3 fonctions régaliennes de l’état : justice, armée, police) l’ensemble des services publics, en particulier ceux de l’éducation et de la santé, qui représentent un marché rentable (et donc des possibilités de spéculations) de plusieurs milliers de dollars (il faut aussi mentionner les services d’intérêts généraux , comme l’eau, au cœur de combines commerciales gigantesques, qui l’eût cru ? ).

Concrètement, il y a risque que, signataires des accords AGCS, certains membres (les pays particulièrement zélés, type nos amis les anglais) puissent demander à d’autres la libéralisation de leurs secteurs afin de créer une « harmonisation commerciale » nécessaires à leurs juteux trafics, ainsi qu’une uniformisation (par le bas, of course) des acquis sociaux. Du point de vue juridique, l’OMC s’est doté d’un tribunal, l’ORD (Organisme de Règlement des Différends), qui pourra sanctionner fortement tout pays ne respectant pas les accords (on rigole pas avec ça). Ainsi, selon le principe « d’irréversibilité », il pourrait être question de sanctionner fortement un pays qui reviendrait sur des accords de libéralisation signés (par exemple en cas de changement de gouvernement, on peut rêver…), ce qui remettrait en cause toute notre tradition démocratique et le droit du peuple à disposer de son avenir ! (on mesure alors le risque, même si demain une autre majorité est aux commandes, d’accepter aujourd’hui n’importe quoi, d’où l’importance de descendre dans la rue avec les copains !).
Il est quand même incroyable qu’il faille encore et encore rappeler que les services publics ne devraient pas être considérés comme des marchandises ordinaires ! Aucun accord ne devrait aboutir à privatiser des services publics contre la volonté des citoyens et tout accord signé par des gouvernants devrait comporter une clause de sauvegarde, au cas où ceux-ci viendraient à être démis par les électeurs.
On s’en rend compte, ce qui se joue actuellement dans les négociations AGCS, est d’une importance capitale pour l’avenir de nos services (et même de nos intérêts vitaux). Or, de ce côté là, c’est silence radio : la plupart de ces négociations se déroulent dans le secret et sans la participation des parlementaires et des partenaires sociaux. Sur la nature et l’évolution de ces accords commerciaux, il appartient à chacun d’aller lui-même aux informations ( voir le site de ATTAC France par exemple) pour faire la part des choses entre ce qui peut relever du fantasme et du risque réel.

Entre fantasme et réalité

« Ayez confiance… », nous dit notre premier ministre. Personnellement, et (sans verser dans le catastrophisme) j’ai du mal à croire que nos ministres ne préparent pas le terrain des libéralisations prévues par l’OMC et par extension, qu’ils ne visent pas la disparition programmée de nos secteurs publics d’activités…
De toute évidence , les projets Raffarin-Ferry-Fillon jouent le pourrissement des services publics. « L’éducation » : suppression de 5 600 postes de surveillants et de 20 000 emplois jeunes, gel des recrutements, en attendant le non remplacement des retraités. Est-ce pour mieux légitimer leur privatisation comme cela a été opéré à la Poste ? La « décentralisation » des personnels non enseignants (pour commencer) : est-ce pour les mettre au contact des besoins locaux, intervenir dans les décisions ou bien s’agit-il de les placer sous la tutelle des collectivités locales, qui volontairement ou non, se déchargeront à plus ou moins long terme sur des organismes privés (comme cela a commencé pour les cantines scolaires ou les services de blanchisserie dans les hôpitaux)? « L’université » n’échappe pas aux réformes non plus, le ministre sous-couvert d’autonomie, entend les mettre aux normes anglo-saxonnes de concurrence et de financement par le privé. Cherchez l’erreur ! Quant au projet « retraite », la ficelle est tellement grosse maintenant, qu’il ne reste plus beaucoup de monde pour croire qu’il n’est pas livré au monde des financiers et des marchands.

Comment, en toute lucidité, ne pas croire que notre sécurité sociale, notre école, notre université, y compris ses personnels, ne sont pas dans le collimateur de nos dirigeants actuels pour les faire… évoluer (un peu à la manière des dinosaures qui ont tellement « évolués » qu’ils ont tous disparus)? Comment raisonnablement ne pas craindre le vent du boulet quand on constate autant de cohérence, de continuité, de collusion entre cette cascade de projets, à fort relent de marchandisation (culte de la concurrence et de la rentabilité) et le libéralisme affiché sans vergogne des projets AGCS… Je crois que le marais est vraiment en danger !
G.O

Pour aller plus loin sur le dossier AGCS (texte récupéré sur Internet)

Les négociations sur les services au sein de l’OMC entrent dans une phase décisive. Les enjeux économiques sont immenses.
Les enjeux démocratiques et sociaux également. Le problème avec l’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) c’est qu’il met sur le même plan des domaines qui ne peuvent relever de la même logique marchande. A l'exception des services publics régaliens (police, justice, défense), aucun autre n’est écarté des négociations.
La distribution de l’eau, la poste, l’éducation, la santé, sont listés par l’OMC comme pouvant entrer dans l’AGCS. Au même titre que les assurances, la banque ou le tourisme.

L’AGCS, boîte à outils de la libéralisation des services

Les services sont au coeur du nouveau marchandage mondial engagé au sein de l’OMC. L’Union Européenne vient de présenter ses « offres » de libéralisation.
Les négociations dureront jusqu’à la fin 2004. Le secteur des services représente déjà 22% du commerce mondial et 2/3 du PIB de l’Union. Aucun domaine n’est épargné par la négociation, pas même les services publics. Chacun doit avoir accès à l’information, sur ce dossier décisif. Pour se faire une opinion, intervenir, peser sur le débat, vous trouverez dans ce dossier, des repères, des arguments, des contre-propositions.

Qu’est-ce que l’AGCS ?

L'AGCS est un des accords fondateurs de l’OMC, entré en vigueur en 1995. Il englobe un accord-cadre, qui énonce les règles générales, et des listes nationales d’engagements, par lesquelles chaque pays donne accès aux entreprises  étrangères sur son marché, secteur par secteur. Au cours de chaque cycle, les négociations se mènent sur la base des « demandes » présentées par chaque pays aux  autres, puis des « offres » concernant l’ouverture de son propre marché.
Chacun est conduit à élargir ses offres au cours des négociations, pour obtenir satisfaction sur ses demandes. Les listes nationales s’allongent ainsi de cycle  en cycle.

Un objectif : la libéralisation

L’accord vise à « obtenir sans tarder une élévation progressive des niveaux  de libéralisation du commerce des services par des séries de négociations multilatérales successives » (préambule et art. XIX). La Commission européenne  prétend qu’avec l’AGCS « il ne s’agit pas de libéralisation des services ». Selon elle, la libéralisation du « commerce » des services n’est pas la libéralisation du secteur concerné à l’intérieur d’un pays. C’est faux. Lorsqu’un pays  « demande », ou « offre », le secteur des services postaux, ou celui de l’eau,  par exemple, ce n’est pas le commerce international de ces services qui est  visé (courrier transfrontalier ou exportation d’eau), mais bien le marché  interne du pays, avec l’objectif de permettre à des groupes étrangers d’y devenir opérateurs. La libéralisation entraînée par l’AGCS ne concerne donc pas  seulement le commerce international, mais bien l’organisation du secteur dans le  pays qui sera soumise aux principes et aux disciplines de l’OMC.

Quels secteurs sont concernés ?

Toutes les activités susceptibles d’intéresser des entreprises étrangères  font l’objet de négociation. L’OMC recense 160 secteurs et sous-secteurs de services : assurances, banques, services aux entreprises, communications, construction/ingénierie, distribution, tourisme, loisirs/culture/sports, transports, environnement (eau, déchets), éducation, santé.
Qu’en est-il des services publics ?

Seuls sont écartés à priori des négociations « les services fournis dans l’exercice du pouvoir gouvernemental ». Mais l’Accord les définit de façon extrêmement restrictive et établit que ceci « s’entend de tout service qui n’est fourni ni sur une base commerciale, ni en concurrence avec un ou plusieurs fournisseurs de services » (article I.3.c). Or, de très nombreux services publics et sociaux sont l’objet d’une tarification (transports publics, poste, énergie...) et sont donc considérés par l’OMC comme fournis sur une base commerciale, ou sont concurrencés par des fournisseurs privés (cliniques privées face aux hôpitaux publics, écoles privées face aux écoles publiques, etc.). Ainsi, à
l'exception des services publics régaliens (police, justice, défense), aucun autre n’est exclu des négociations. Ainsi, l’OMC reconnaît que 43 « engagements » de libéralisation ont été pris dans la santé et 41 dans l’éducation depuis l’entrée en vigueur de l’AGCS.

L’enjeu économique

Le commerce mondial des marchandises et des services représente environ 6 000 milliards d’euros chaque année. En son sein, les services comptent pour 1 300 milliards d’euros. En 2001, le commerce des services comptait pour 25% des échanges entre l’Union Européenne et le reste du monde. La France est le premier producteur de services en Europe.
Les services pèsent au total près de 2/3 du PIB de l'UE. Ce qui inclut non seulement les services d'assurances, la banque, le tourisme... mais aussi la santé, l'Education, les transports publics, l'énergie. Autant de secteurs  aujourd'hui peu ouverts à la concurrence internationale. Il est vrai que, à l'échelle mondiale, ces « nouveaux marchés » potentiels sont énormes et suscitent bien  des appétits : 2000 milliards d’euros pour l’Education, 3500 milliards pour la santé.

Calendrier des négociations

• Novembre 2001 : la déclaration finale de la conférence ministérielle de l’ OMC à Doha (Qatar) lance le Doha Development Round (Cycle du Développement de Doha). Un calendrier a été établi :
• Le 30 juin 2002, transmission des demandes : chaque membre de l’OMC a adressé ses demandes à chaque autre membre, c’est-à-dire une liste de secteurs de services qu’ il souhaite voir soumis aux règles de l’AGCS.
• Le 31 mars 2003, transmission des offres : chaque membre devait déposer la  liste des secteurs de services qu’il offre de libéraliser sur son propre territoire. L’échéance n’a pas été respectée par l’UE qui a fourni sa liste le 29 avril.
• 10 au 14 septembre 2003 : 5ème conférence ministérielle de l’OMC, à Cancun (Mexique). Les pays membres feront le point sur l’avancée ou les blocages des négociations, notamment sur les services. La déclaration de Doha prévoit également que cette session doit ouvrir des négociations sur les marchés publics ainsi que sur “la politique de la concurrence”, et décider “s’il convient de lancer des négociations dans le domaine de l’investissement”.
• 1er janvier 2005, date limite fixée pour conclure l’ensemble du cycle de négociations (agriculture, services, etc) par un accord global lors d’une session extraordinaire de la conférence ministérielle.