RETRAITE : LA SPECIFICITE DU METIER D’ENSEIGNANT par Gilbert Orsi
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Au cours des groupes
de travail techniques qui se sont tenus au Ministère de la Fonction Publique
la FSU a abordé la situation particulière des enseignants.
Un métier qui a changé
En contact direct avec des enfants et des adolescents, le métier d'enseignant
a considérablement évolué. Ce n'est pas l'image d'enseignant
qu'ont pu connaître les générations antérieures.
Les problèmes auxquels la société est confrontée,
chômage, exclusion, violence, insécurité ne s'arrêtent
pas à la porte de l'école. Les tensions y sont réelles
et les exigences de plus en plus fortes.. Parce qu'il faut donner à chaque
instant le meilleur de soi, être à l'écoute de chacun, transmettre
des valeurs qui ne sont pas les plus reconnues socialement, l'exercice professionnel
est usant et génère des tensions et du stress.
Le rapport Vallemont de juin 2001 a bien pointé cette pénibilité
" Les métiers de l'éducation pratiqués tout au long
d'une carrière avec un caractère marqué de répétitivité
des activités et des rythmes de travail, avec aussi dans certains cas
une remise en cause de l'autorité du maître par les élèves
et les parents, peuvent à la longue devenir porteur de stress, de fatigues
et de lassitude et expliquer " le ras le bol " qu'inspire aux enseignants
leur fonction lors de leur départ en retraite. "
Prendre sa retraite dès 60 ans
Le ras-le-bol des enseignants du second degré n'est pas à démontrer,
ils n'ont qu'une hâte c'est de partir le plus rapidement possible dès
qu'ils atteignent l'âge de 60 ans et quel que soit le nombre d'annuités.
Les professeurs certifiés sont partis en 2002 à 60,3 ans ; seul
un tiers d'entre eux totalisait 37,5 annuités. Les professeurs d'EPS
partent en moyenne à 60,1 ans. Le Conseil d'Orientation des retraites
(cor) a constaté qu'au cours de l'année 2000, 64% des enseignants
de second degré avaient atteint les 60 ans sans réunir les conditions
d'obtention d'une pension à taux plein et que 90% de ceux-ci étaient
partis en retraite dès 60 ans plutôt que de prolonger leur activité
pour obtenir une pension à taux plein. Ce sont également les enseignants
du second degré qui ont le plus utilisé les dispositifs de CFA
et de CPA. Ils seraient particulièrement pénalisés par
une décote.
Les enseignants d’EPS particulièrement concernés
Pour les enseignants d'EPS, la spécificité de leur métier
est souvent ignorée : pénibilité physique et conditions
de travail et d'exercice souvent difficiles, déplacements souvent longs
entre l'établissement et les installations sportives, voix souvent forcée
du fait des lieux utilisés dans les grands espaces extérieurs
et intérieurs, vigilance permanente et fort investissement corporel,
fréquence des séquelles traumatiques diminution des capacités
physiques liées à l'âge.
Des revendications spécifiques
Pour toutes ces raisons dans le débat engagé par le gouvernement
sur la réforme des retraites, les enseignants posent avec beaucoup de
force la question de la prise en compte de manière spécifique
de la pénibilité de leurs métiers, de l'aménagement
des fins de carrière et de l'âge de départ à la retraite.
Ils posent également celle de la prise en compte des années d'étude,
celle des périodes de travail à temps partiel, nombreuses dans
les professions très féminisées, souvent imposées
aux non titulaires pour la constitution des droits à pension.
Enfin les conditions d'acquisition des droits à pension préoccupent
particulièrement les enseignants sur l'aspect de la période de
référence, les " 6 derniers mois ". Toute modification
sur ce point affecterait particulièrement les enseignants qui accèdent
aux indices terminaux de leurs corps souvent à la veille de leur départ
en retraite et aboutirait, dans certains cas à porter atteinte aux mesures
dites de " revalorisation de certains corps ".
Des exigences claires
Dans le cadre de nos revendications générales : un départ
à 60 ans, avec 75% du dernier salaire brut pour 37,5 annuités,
la spécificité de la fonction enseignante doit être reconnue.
Il est nécessaire de réfléchir à des aménagements
de fin de carrière (le maintien et la pérennisation du CFA, élargissement
des possibilités d'accès à la CPA) de prendre en compte
les pénibilités, la validation des années d'étude
- on entre en moyenne à 26 ans dans l'enseignement,- et les périodes
d'activité à temps partiel, d'accroître les possibilités
de mobilité professionnelle, d'augmenter les dispositifs de réadaptation
et de reclassement, de maintenir les droits acquis par les agents publics qui
ont 15 ans de service actif.
Travailler plus longtemps : un non sens
Retarder l'âge de départ en retraite des enseignants est inconcevable
et ce pour plusieurs raisons : d'une part le métier est devenu usant,
fatiguant et nécessite une vigilance et un investissement forts au quotidien,
d'autre part en période de chômage massif de nombreux jeunes ayant
entrepris une formation exigeante seraient privés de débouchés
vers les métiers de l'enseignement et contraints d'accepter des emplois
précaires ou hors de leur qualification.
G. O