RETRAITE : LA SPECIFICITE DU METIER D’ENSEIGNANT par Gilbert Orsi


Copyright Snepnice 2004

Au cours des groupes de travail techniques qui se sont tenus au Ministère de la Fonction Publique la FSU a abordé la situation particulière des enseignants.
Un métier qui a changé
En contact direct avec des enfants et des adolescents, le métier d'enseignant a considérablement évolué. Ce n'est pas l'image d'enseignant qu'ont pu connaître les générations antérieures. Les problèmes auxquels la société est confrontée, chômage, exclusion, violence, insécurité ne s'arrêtent pas à la porte de l'école. Les tensions y sont réelles et les exigences de plus en plus fortes.. Parce qu'il faut donner à chaque instant le meilleur de soi, être à l'écoute de chacun, transmettre des valeurs qui ne sont pas les plus reconnues socialement, l'exercice professionnel est usant et génère des tensions et du stress.
Le rapport Vallemont de juin 2001 a bien pointé cette pénibilité " Les métiers de l'éducation pratiqués tout au long d'une carrière avec un caractère marqué de répétitivité des activités et des rythmes de travail, avec aussi dans certains cas une remise en cause de l'autorité du maître par les élèves et les parents, peuvent à la longue devenir porteur de stress, de fatigues et de lassitude et expliquer " le ras le bol " qu'inspire aux enseignants leur fonction lors de leur départ en retraite. "
Prendre sa retraite dès 60 ans
Le ras-le-bol des enseignants du second degré n'est pas à démontrer, ils n'ont qu'une hâte c'est de partir le plus rapidement possible dès qu'ils atteignent l'âge de 60 ans et quel que soit le nombre d'annuités. Les professeurs certifiés sont partis en 2002 à 60,3 ans ; seul un tiers d'entre eux totalisait 37,5 annuités. Les professeurs d'EPS partent en moyenne à 60,1 ans. Le Conseil d'Orientation des retraites (cor) a constaté qu'au cours de l'année 2000, 64% des enseignants de second degré avaient atteint les 60 ans sans réunir les conditions d'obtention d'une pension à taux plein et que 90% de ceux-ci étaient partis en retraite dès 60 ans plutôt que de prolonger leur activité pour obtenir une pension à taux plein. Ce sont également les enseignants du second degré qui ont le plus utilisé les dispositifs de CFA et de CPA. Ils seraient particulièrement pénalisés par une décote.
Les enseignants d’EPS particulièrement concernés
Pour les enseignants d'EPS, la spécificité de leur métier est souvent ignorée : pénibilité physique et conditions de travail et d'exercice souvent difficiles, déplacements souvent longs entre l'établissement et les installations sportives, voix souvent forcée du fait des lieux utilisés dans les grands espaces extérieurs et intérieurs, vigilance permanente et fort investissement corporel, fréquence des séquelles traumatiques diminution des capacités physiques liées à l'âge.
Des revendications spécifiques
Pour toutes ces raisons dans le débat engagé par le gouvernement sur la réforme des retraites, les enseignants posent avec beaucoup de force la question de la prise en compte de manière spécifique de la pénibilité de leurs métiers, de l'aménagement des fins de carrière et de l'âge de départ à la retraite. Ils posent également celle de la prise en compte des années d'étude, celle des périodes de travail à temps partiel, nombreuses dans les professions très féminisées, souvent imposées aux non titulaires pour la constitution des droits à pension.
Enfin les conditions d'acquisition des droits à pension préoccupent particulièrement les enseignants sur l'aspect de la période de référence, les " 6 derniers mois ". Toute modification sur ce point affecterait particulièrement les enseignants qui accèdent aux indices terminaux de leurs corps souvent à la veille de leur départ en retraite et aboutirait, dans certains cas à porter atteinte aux mesures dites de " revalorisation de certains corps ".
Des exigences claires
Dans le cadre de nos revendications générales : un départ à 60 ans, avec 75% du dernier salaire brut pour 37,5 annuités, la spécificité de la fonction enseignante doit être reconnue. Il est nécessaire de réfléchir à des aménagements de fin de carrière (le maintien et la pérennisation du CFA, élargissement des possibilités d'accès à la CPA) de prendre en compte les pénibilités, la validation des années d'étude - on entre en moyenne à 26 ans dans l'enseignement,- et les périodes d'activité à temps partiel, d'accroître les possibilités de mobilité professionnelle, d'augmenter les dispositifs de réadaptation et de reclassement, de maintenir les droits acquis par les agents publics qui ont 15 ans de service actif.
Travailler plus longtemps : un non sens
Retarder l'âge de départ en retraite des enseignants est inconcevable et ce pour plusieurs raisons : d'une part le métier est devenu usant, fatiguant et nécessite une vigilance et un investissement forts au quotidien, d'autre part en période de chômage massif de nombreux jeunes ayant entrepris une formation exigeante seraient privés de débouchés vers les métiers de l'enseignement et contraints d'accepter des emplois précaires ou hors de leur qualification.
G. O